À la surprise même des partisans du vélo, Valérie Plante et Denis Coderre ont atteint leur cible de croissance du vélo à Montréal en 2023, avec plusieurs années d’avance.
Blaise Rémillard
Directeur général par intérim
Conseil régional de l’environnement de Montréal
Il y a des fois où il faut se réjouir d’avoir eu tort! C’est mon cas et celui de mon organisation, le Conseil régional de l’environnement de Montréal. C’est certainement le cas aussi de nombreuses autres personnes qui doutaient depuis des années que la ville allait atteindre son objectif de porter la part des déplacements vélo à 15% dans les quartiers centraux de Montréal, comme promis par Ensemble Montréal (pour 2032), sous Denis Coderre, puis par Projet Montréal (pour 2027).
À la surprise de plusieurs, les résultats de la dernière enquête sur les déplacements dans le Grand Montréal, révélés la semaine dernière, confirment que le vélo est passé de 7% des déplacements dans les quartiers centraux en 2018 à 15% en 2023. Un bond prodigieux!
Les sceptiques sont confondus!
Si vous cherchez, vous pourrez trouver plusieurs citations de moi et d’autres organisations pro-vélo en 2017 et en 2022 qui ne croyaient pas du tout que la ville était en voie d’atteindre sa cible. Lors des Rendez-vous de la mobilité active de 2023, quelques semaines avant l’enquête, j’avais moi-même posé la question à des dizaines de spécialistes réunis dans un atelier sur les subventions au vélo et l’espoir était vraiment au plus bas.
Que s’est-il passé?
Plusieurs choses expliquent notre heureuse méprise. D’abord, la nouvelle méthodologie de l’enquête capte mieux les déplacements actifs que l’ancienne. Il semble donc que nous sous-estimions les déplacements en vélo depuis des années.
Ensuite, le télétravail a fait chuter le nombre de déplacements en auto (-14%) et en transports collectifs (-27%), pendant que le nombre de déplacements en vélo (+76%) et à pied (+22%) grimpait!
Il faut dire que c’est aussi le résultat de décennies de construction de pistes cyclables, malgré les plaintes et même les menaces de morts reçues par les élus et fonctionnaires qui avaient le cran de donner de l’espace aux cyclistes.
Pourquoi c’est une bonne nouvelle (pour tout le monde) ?
La popularité du vélo ne fait pas l’affaire de tout le monde. Perdre une voie de circulation ici, un stationnement par là, ça dérange et ça se comprend. Surtout quand on ne fait pas de vélo!
Cependant, collectivement, on devrait se réjouir et soutenir la croissance du nombre de cyclistes. D’abord, parce que le vélo ne prend presque pas de place. En effet, avoir 15% des déplacements avec moins de 2% de la surface des rues réservée aux pistes cyclables, c’est une aubaine!
Deuxièmement, le vélo est le mode de transport qui nous fait gagner le plus d’argent, même quand on n’en fait pas. En effet, une récente étude des HEC nous apprend qu’on met 47 fois moins d’argent public pour le vélo que pour l’auto et que pour chaque dollar de nos taxes et impôts investi dans le cyclisme on obtient 1,40$ en bénéfices sociaux, notamment des bénéfices de santé (les cyclistes vont 10% moins souvent à l’hôpital).
Il n’y a pas de honte à conduire son auto si on n’a pas d’autre option, tout est organisé pour ça. Mais, si on sait compter, on a intérêt à voir le vélo prendre plus de place dans nos rues et dans les budgets de nos gouvernements.
Vous êtes embêté par la congestion? Aimez les vélos! Vous désespérez devant les réformes du système de santé qui ne donnent rien ? Choisissez la prévention de la maladie et soutenez le vélo! Vous cherchez un peu d’espoir face aux catastrophes climatiques qui nous coûtent déjà les yeux de la tête? Allez voir le Réseau express vélo à l’heure de pointe, ça calme!
Sur ce, je lève mon verre à mon erreur sur la croissance des déplacements à bicyclette et je vous souhaite “Santé”!
Lire la lettre ouverte publiée dans La Presse