Profiter de l’engouement collectif du premier Sommet sur la Trame verte et bleue active montréalaise pour accélérer la cadence

Située dans les basses terres du fleuve St-Laurent, la région métropolitaine de Montréal se caractérise par la présence de milieux naturels d’une très grande richesse animale et végétale.  Ces milieux naturels se déclinent initialement par la présence d’une forêt dense, de milieux humides et de plusieurs ruisseaux de surface qui permettaient à la vie de s’épanouir convenablement. Toutefois, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts bâtis par les humains. La croissance démographique de la métropole après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la grande disponibilité d’énergies fossiles et la prolifération d’infrastructures de transport motorisé —et la grande pollution atmosphérique qui en découle— figurent parmi les raisons qui expliquent la fragmentation des habitats naturels et l’érosion presque continue de la biodiversité en milieu urbain. Et la région de Montréal n’y a pas échappé.

Heureusement, la collectivité montréalaise s’active depuis plusieurs années dans la lutte contre la crise climatique en cours et de nombreux organismes mènent des projets de lutte contre les îlots de chaleur, où la plantation d’arbres et la bonification de la biodiversité, tout comme la protection des derniers milieux naturels et friches urbaines par des groupes citoyens, permettent de rêver à renverser la vapeur. 

Toutefois, la tâche reste colossale et requiert une implication accrue des différents acteurs de la société civile afin de transformer nos villes et de les rendre plus résilientes face aux changements climatiques.  

Les corridors verts et actifs : des infrastructures vertes aux bénéfices variés

Parmi les moyens qui existent afin de lutter contre la crise de la biodiversité, l’aménagement de corridors écologiques urbains constitue une partie importante de la solution. 

Dans une étude publiée en 20191, Alexandre Beaudoin, aujourd’hui conseiller en biodiversité à l’Université de Montréal et instigateur du Corridor écologique Darlington, définit un corridor écologique urbain comme un « lien pour la biodiversité locale, constitué d’arbres, unissant des espaces verts existants dans la trame urbaine par une approche interdisciplinaire et visant l’atteinte d’une grande diversité d’objectifs propres à chaque milieu. Ces objectifs sont souvent associés aux défis que rencontreront les villes face aux changements climatiques. »

Malgré la complexité de la mise en place de telles infrastructures vertes, d’importants acteurs tels que la Communauté métropolitaine de Montréal, la Ville de Montréal, plusieurs arrondissements et Hydro-Québec travaillent activement à la création de corridors écologiques, de liens verts et actifs. Ces thématiques suscitent beaucoup d'intérêt auprès du milieu universitaire et les projets de recherche se multiplient sur les corridors écologiques et sur l’implantation des infrastructures vertes et bleues en milieu urbain. Le milieu communautaire et les groupes citoyens se mobilisent également à une échelle plus locale afin d’identifier des axes de connectivité entre les espaces verts et de mobiliser la population. 

Depuis 2015, le CRE-Montréal joue d’ailleurs un rôle important dans ce dossier dans le cadre de la campagne ILEAU. Initiée dans l’Est de Montréal en 2015, ILEAU s’est progressivement étendue à l’ensemble de l’île de Montréal grâce à une étroite collaboration avec de nombreux partenaires. Coordonnateur de la campagne, le CRE-Montréal mobilise, outille les organisations et favorise un maillage des initiatives et l’élaboration d’une vision commune à l’échelle régionale. Réunissant une diversité de partenaires, ILEAU a entre autres permis de mobiliser les partenaires autour de deux idées de corridors verts et actifs reliant le fleuve St-Laurent à la rivière des Prairies, par l’entremise d’activités de co-construction et de priorisation. 

Mais il reste encore beaucoup à faire et au cours des dernières années, plusieurs organisations ont exprimé le besoin d’assurer un meilleur arrimage entre les démarches, de favoriser l’accès à l’information et d’offrir des espaces pour le partage des expériences et des expertises.

Un premier Sommet montréalais pour concerter les acteurs

Sensible à ces demandes, le Conseil régional de l’environnement de Montréal a organisé le 17 avril dernier la première édition du Sommet sur la Trame verte et bleue active montréalaise. Cet événement, organisé en collaboration avec Espace pour la vie, a été une occasion de partager les initiatives locales et régionales de corridors et de liens verts et actifs, et de réfléchir collectivement aux façons d'accélérer le déploiement et la consolidation d’une trame verte et bleue active à l'échelle de l'île de Montréal. 

Le Sommet proposait trois grands volets : 

  • Déploiement de la Trame verte et bleue active montréalaise: où en sommes-nous? : État des lieux de la Trame verte et bleue (TVB) active montréalaise, autant d’un point de vue des connaissances scientifiques que des enjeux sociaux qui y sont liés.
  • Un grand bond en avant! : Présentation de sept projets de corridors verts et actifs en cours de réalisation (projets municipaux et institutionnels), mais aussi d’autres projets en cours d’idéation (communautaires et citoyens).
  • Quelles perspectives d’avenir pour la Trame verte et bleue active montréalaise? : Tour d’horizon des différentes pistes d’action afin de faciliter le déploiement de la Trame verte et bleue active dans le futur.

Les participant.e.s ont également assisté à une présentation sur le thème de l’écogentrification par Marie Lapointe, conseillère scientifique à l’Institut national de santé publique du Québec. Son intervention a permis d’aborder les contextes dans lesquels se préoccuper de la gentrification ainsi que de bonnes pratiques pour prévenir les impacts négatifs. Deux ateliers réalisés par l’Université de Montréal complétaient la programmation: 

  • « Dessine-moi la ville! », qui a permis de mieux comprendre comment les corridors verts et actifs contribuent à l’atteinte des Objectifs en développement durable;
  •  « La contribution des corridors verts à la santé des collectivités », pour réfléchir à comment l’aménagement des corridors verts et actifs contribue à une meilleure santé physique mentale de l’ensemble de la population.

Le déploiement de la Trame, entre effervescence et obstacles

Le Sommet a été une occasion privilégiée de faire le point sur les derniers développements de la Trame verte et bleue montréalaise et de constater l’effervescence des initiatives à toutes les échelles territoriales. Les échanges ont aussi permis d’identifier plusieurs obstacles et freins à un déploiement rapide de la Trame :

  • Le manque d’espace : Le territoire montréalais est déjà très dense et les pressions pour le développement immobilier et industriel sont fortes. Selon les choix d’aménagement priorisés, ce développement peut entraîner la disparition d'espaces verts et d'habitats naturels pour les espèces sauvages ou venir compromettre la continuité de certains axes verts et actifs.
  • Le manque de financement : La création de la Trame verte et bleue active nécessite des investissements importants en termes de planification, d'aménagement et d'entretien. 
  • Les intérêts divergents : Les propriétaires fonciers, les développeurs immobiliers, les entreprises et les citoyens peuvent avoir des visions différentes en matière d'utilisation du territoire. 
  • Les barrières physiques : Les barrières physiques telles que les routes, les autoroutes, les voies ferrées peuvent empêcher les espèces sauvages de se déplacer librement à travers la ville, limitant ainsi la création de corridors écologiques. Ces barrières complexifient également le développement d’un réseau continu de transport actif.  
  • Le manque de compréhension : Un travail terrain de sensibilisation doit être mené auprès de la population afin de vulgariser le concept de la trame verte et bleue active, de partager les bénéfices associés aux aménagements et l’impact concret qu’un tel réseau peut avoir sur la qualité des milieux de vie. Les différentes dénominations (corridors, trame, liens), attachées à des définitions spécifiques, viennent également ajouter un niveau de complexité à la compréhension au sein du grand public. 
  • Le travail en vase clos : Le caractère complexe de la mise en oeuvre de la Trame verte et bleue active requiert de revoir les façons de travailler et nécessite un meilleur travail concerté réunissant les différentes expertises des parties prenantes afin de passer de la théorie à l’action.

Un travail de stratégie et de concertation

La création d'une trame verte et bleue active dans la région de Montréal est un projet ambitieux qui peut être confronté à plusieurs obstacles. Cependant, en travaillant ensemble et en surmontant ces défis, nous pouvons créer un environnement plus sain, plus durable et plus résilient pour l’ensemble de la population montréalaise.

Les révisions du Plan d'urbanisme et mobilité (PUM) et du Plan métropolitain d'aménagement durable (PMAD) constituent des occasions uniques pour intégrer les corridors verts et actifs dans une vision d'aménagement durable et à long terme pour la région. En incluant les corridors verts et actifs dans ces plans, les décideurs peuvent créer des espaces verts et des axes de transport actifs qui répondent aux besoins des citoyens tout en s’inscrivant dans les actions d’envergure visant la résilience face aux changements climatiques. Il est également crucial de veiller à la pérennité de ces espaces verts et des axes de transport actif en adoptant des politiques et des stratégies à long terme pour leur gestion et leur entretien. Cela peut garantir que ces espaces restent accessibles et durables pour les générations futures. 

Avec ce premier Sommet, le CRE-Montréal souhaitait poser les bases d’une communauté de pratiques regroupant les différentes parties prenantes engagées dans la création et la consolidation de la Trame verte et bleue active. Pari réussi comme en témoignent la participation (une centaine de personnes d’horizons divers) ainsi que les commentaires très positifs reçus à la suite de l’événement. Fort de cet élan, nous comptons maintenant poursuivre notre travail de concertation, de maillage, d’accompagnement et de valorisation des projets inspirants. N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez rejoindre ce mouvement collectif.


1Beaudoin et al., (2019). Analyse des caractéristiques, de la gouvernance et de la mise en œuvre des projets de corridors écologiques à Montréal

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